Depuis la découverte de l’Antarctique au début du 19e siècle, le nombre d’humains qui arrivent sur le continent a augmenté progressivement. Des premiers explorateurs jusqu’aux chasseurs et aux scientifiques, tous les humains qui sont passés ont laissé des traces de leur passage sur le continent et sur leur paysage. L’empreinte écologique de l’humain a commencé à affecter ces écosystèmes polaires qui sont sensibles aux perturbations et il y a une préoccupation croissante à propos de la menace posée à l’intégrité naturelle des écosystèmes du continent à cause de la pollution, de la modification du comportement des animaux ainsi qu’à cause de l’introduction d’espèces non-indigènes.
La péninsule de Fildes (île du Roi-George, archipel des îles Shetland du Sud) a été le théâtre d’une occupation humaine permanente depuis la construction de la station Bellingshausen en 1968. Il y a maintenant six bases permanentes sur la péninsule qui en font l’endroit avec la population humaine la plus dense en Antarctique avec une population permanente de 125 et un pic estival de 300 personnes. De nombreuses infrastructures ont été installées afin de supporter ces bases incluant un aéroport, des routes, des pipelines ainsi que des génératrices au diésel. La construction et l’opération de ces infrastructures ont causé des perturbations à l’environnement de l’Antarctique même si on ne peut connaître la nature précise de ces perturbations qui sont encore peu comprises.
Les lacs sont nombreux sur la péninsule de Fildes avec un bon nombre d’entre eux qui sont à proximité de stations permanentes incluant ceux qui sont utilisés comme source d’eau potable. S’il semble logique que ces lacs aient été affectés par la présence humaine à proximité, seulement quelques études limnologiques ont étudié les caractéristiques de ces lacs et peu a été fait pour connaître leurs communautés biologiques et leurs processus chimiques. La présente étude permettra d’étudier une série de lacs de la péninsule en utilisant une approche combinée entre la paléolimnologie et la limnologie dans le but d’en savoir davantage sur la façon dont les lacs ont été affectés par la présence humaine du dernier siècle. Le projet vise donc l’analyse de carottes de sédiments extraites de cinq lacs qui sont ou qui ont été utilisés comme source d’eau potable ainsi que deux autres lacs qui ne l’ont jamais été.
Les conditions des lacs de la péninsule de Fildes remontant à avant la présence humaine seront déterminées afin de savoir comment les polluants anthropiques ont affecté les lacs depuis que les bases ont été installées. Les diatomées seront utilisées comme indicateur biologique afin de déterminer comment les communautés aquatiques auraient pu changer à travers le temps, en réponse aux activités humaines.
Les résultats de l’étude seront une étape importante dans la surveillance des impacts causés par la présence humaine en Antarctique. Les connaissances acquises serviront à mieux comprendre comment l’intensité changeante d’activités humaines ont affecté le paysage local et, de ce fait, comment les écosystèmes de la région répondront aux changements futurs. Comme plusieurs lacs de l’étude sont utilisés comme source d’eau potable, la compréhension de leur réponse aux processus naturels et anthropiques à travers le temps permettra d’évaluer leur durabilité à long terme en tant que source d’eau potable pour les bases de l’Antarctique.